samedi 28 avril 2007

Conseil en communication

Le conseil en communication politique s´est fait une véritable place dans le milieu du pouvoir et nombreux sont les conseillers qui sont célèbres et respectés : Jacques Séguéla[1], Lorrain de Saint Afrique[2], Claude Chirac, Jacques Pilhan... L'ancien premier ministre Jean-Pierre Raffarin est lui-même un ancien chef de produit, devenu directeur d´un cabinet de conseil en communication[3]. Le marketing s´est fait une véritable place dans le paysage politique français. Quoi de plus normal, puisque le but du politique est de séduire ?

Dès lors la question se pose de savoir si la démocratie ne pâtit pas de ce vernis appliqué, de cette auréole faussée dont se bardent (se maquillent) les politiques ? Le marketing politique pourrait peut-être faire gagner n´importe quel escroc (qui est Nicolas Miguet ?), s´il suivait les règles et s´appliquait à séduire. Est-ce qu´il y a un bénéfice pour la société à avoir un président dont l´idéologie et les actions sont guidées par le marketing ? Le message politique s´évapore, l´on vient à se lasser de la citoyenneté et l´abstention ne cesse de croître. A l´opposé, le marketing politique est peut-être ce raffinement qui permet au politique de se montrer sous son meilleur jour. Il permet de le magnifier, et cela n´est qu´un bien, car les citoyens lui accordent plus de confiance et le regardent comme un responsable respectable. La croyance en l´autorité du chef représentatif est un élément positif dans la société.

Les interrogations sur les effets du marketing politique, ses bienfaits, ou peut-être ses conséquences néfastes sont aujourd´hui un débat fort alimenté dans la presse et la littérature politique. Il semble que le candidat à une élection soit contraint d´utiliser ses méthodes : dès sa première utilisation en 1952 par Eisenhower[4], le marketing politique a semblé favoriser largement le candidat, tant et si bien qu´en 1956, A. Stevenson, qui se représentait pour le parti démocrate et qui avait refusé de faire appel aux méthodes de communication commerciales en 1952, se résigna à faire appel à des professionnel de la communication. En Europe, d´abord la Grande-Bretagne en 1959, puis la Belgique en 1965 suivirent le modèle américain. En France, c´est à l´occasion du premier suffrage universel pour les élections présidentielles que le marketing politique fut utilisé pour la première fois. « Un inconnu nommé Lecanuet », comme titrait le Nouvel Observateur du 1er décembre 1965, crédité de 3% des intentions de votes, obtint près de 16% des suffrages exprimés alors que le Général de Gaulle, grand favori était mis en ballottage par François Mitterrand, comme le suggéraient les sondages. Les techniques du marketing montrent, comme aux Etats-Unis treize années plus tôt, des résultats qui semblent probants. Il semble en fait que les hommes politiques se sont soumis aux techniques du marketing politique dans la mesure où ils n´ont pu rester à l´écart des développements technologiques qui ont amené des nouvelles techniques de communication de masse. Présenter des programmes cohérents, et des qualités humaines et intellectuelles n´est plus suffisant quand les adversaires ont recours à des techniques de marketing pour valoriser leur image et conquérir l´électorat. Il faut, comme les adversaires, utiliser ces techniques de communication modernes, au risque d´être marginalisé de la campagne et d´avoir une image de candidat du passé. Les politiques se sont accommodés de ces méthodes, allant jusqu´à les considérer comme « un mal nécessaire pour la démocratie »[5], un brevet de modernité.



[1] Docteur en pharmacie, Jacques Séguéla fut reporter à 'Paris Match' et 'France Soir'. A l´age de 32 ans, avec Bernard Roux, Alain Cayzac et Jean-Michel Goudard il crée RSCG. On lui doit plus de 1500 campagnes publicitaires et 15 campagnes présidentielles (François Mitterrand, Lionel Jospin,…) Séguéla marque indubitablement le paysage publicitaire français. Vice-président d'Havas.

[2] Ancien conseiller en communication de Jean-Marie Le Pen

[3] Diplômé de l’Ecole Supérieure de Commerce de Paris, chef de produit pour les cafés Jacques Vabre, directeur général du cabinet-conseil Bernard Krief Communication.

[4] Il fit appel au cabinet de relations publiques BBDO et à un spécialiste du marketing commercial audiovisuel, pour réaliser une campagne qui comptait 49 spots publicitaires pour la télévision.

[5] Marketing et Communication politique, Serge Albouy, 1994, L´Harmattan.